Get Mystery Box with random crypto!

Un des problèmes classiques qui se pose à toute lutte de site | Infos ZAD

Un des problèmes classiques qui se pose à toute lutte de site est celui de son projet même, celui de la tension entre occupation ponctuelle destinée à s’auto-organiser pour partir à l’assaut du monde qui l’entoure au milieu de mille autres initiatives décentralisées, et installation permanente qui finit par concentrer des forces ordinairement incompatibles en se projetant comme îlot expérimental d’alternatives plus ou moins radicales. Un jour ou l’autre, cette contradiction intenable entre alternative dans et offensive contre l’existant finit par éclater au grand jour, que ce soit lorsque la pression policière s’accroît (avec les traditionnelles distanciations médiatiques d’attaques et dénonciation des radicaux), ou à l’inverse sous le poids de la possibilité négociée de normalisation (avec le traditionnel nettoyage des éléments incontrôlés).
Ce qui est remarquable dans ce qui vient de se passer avec la lutte de Notre-Dame-des-Landes, ce n’est donc pas tant que les citoyennistes n’aient même pas attendu une semaine pour littéralement trinquer avec la préfète et le général d’armée directeur de l’ensemble de la gendarmerie, mais que se soient précisément les partisans inconditionnels de la composition avec tous qui aient été la veille parmi les plus zélés à détruire une des deux cabanes et à en expulser ses occupants montés sur le toit. Lorsque composer signifie négocier avec l’État aux côtés de syndicats et d’élus, lorsque composer signifie à un moment crucial de la lutte choisir le camp de l’ordre face aux minorités rétives à toute normalisation, cela ne fait en réalité que révéler le véritable sens de ce mot élastique: la collaboration avec le pouvoir en place. Ce type de convergence de fait entre pouvoir et contre-pouvoir, entre constituants et destituants, n’est pas le simple résultat d’une situation d’urgence ou de panique, mais bien la conséquence d’une logique présente dans le concept même de composition. Permettant aux autoritaires de tous bords de s’arranger entre eux lorsqu’il le faut, il fonctionne naturellement aussi aux dépens des anti-autoritaires dont les états d’âme sont trop exigeants et pas assez realpolitik.
Structurellement, le concept de composition n’est en effet rien d’autre que la déclinaison en interne du principe militaire d’alliance vers l’extérieur. Si le second s’applique entre ennemis hier encore irréconciliables et demain à nouveau en guerre, le premier concerne de son côté des adversaires au sein d’un même camp, capables d’y cohabiter sans se détruire ou s’exclure en mettant de côté leurs visions opposées pour concentrer provisoirement leurs forces face à un ennemi commun. Dans les deux cas, cela présuppose une remarquable capacité à éradiquer l’unicité de chaque individu et la singularité de ses idées, tout comme la multiplicité de leurs associations possibles, afin d’entraîner des troupes variées pour qu’elles marchent d’un même pas au service d’une entité supérieure (le parti, l’assemblée, le collectif, le peuple, le mouvement de lutte).