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Même au Ritz, le personnel est moins prévenant, car il espère | Chroniques de la chute d’une civilisation

Même au Ritz, le personnel est moins prévenant, car il espère un pourboire, alors que les frères désintéressés n'attendent que la canonisation.

Je déambule dans du Beau au service de mon âme. Un monastère est une utopie aussi artistique que spirituelle : « la cité de Dieu » est un phalanstère non laïc. La communauté de l'abbaye Sainte-Marie de Lagrasse ­dépendait du diocèse de Gap, dont l'évêque fut autrefois Jean-Michel Di Falco, le directeur de mon école ­Bossuet. J'ai écrit avec lui un dialogue, Je crois, moi non plus, publié en 2004, l'année où les chanoines ont emménagé ici. Puisque ce mystère me dépasse, feignons de croire que ceci n'est qu'une coïncidence. […]

Je ne veux plus partir ! Il va falloir me virer à coups de sandales-chaussettes dans le cul pour que je retourne dans le monde pollué acheter des objets vains dans des galeries marchandes. Je veux vivre au ralenti comme eux, dans la douceur. […]

Au matin du quatrième jour, je suis reparti dans la ­société encombrée pour retrouver l'amour et combattre les monstres.

À présent que je suis de nouveau noyé dans le tumulte, au fond de mon maelström contemporain, de nouveau étourdi et fatigué, je me souviens que, quelque part en Languedoc, des hommes en robe blanche continuent ­chaque jour de chanter sous une nef gothique les mêmes hymnes immatériels, pour les siècles des siècles.

Et penser à ces hommes agenouillés m'aide à tenir debout.

La Guerre du feu

Par Boualem Sansal

Je suis athée et je le regrette. Je ne le suis pas parce que je refuse Dieu, je le suis parce que je ne peux pas l'atteindre, parce que je n'ai pas les moyens de l'accueillir dans mon esprit et dans ma chair et ­vivre pleinement, librement, merveilleusement cette rencontre. Je ne veux pas non plus lui imposer le spec­tacle du mauvais croyant que je serais, ambigu et velléitaire. Il n'y a pas de milieu, on est dans ou en dehors de la foi. On peut cependant être à mi-chemin si la volonté y est, mais cette énergie je ne l'ai pas trouvée. Je suis athée par désespoir, par impuissance, par fatalisme, ­dirais-je, si je devais puiser dans le vieux fond islamique de mon pays. […]

Le monde dans lequel se meut l'homme, réduit aujourd'hui à sa plus simple individualité, est un monde vide ; la vie y manque d'air, de lumière et de chaleur. Que dire du sacré et de la spiritualité, ces mots désuets ? On ne les entend plus que dans les séries télévisées hollywoodiennes, qui ont fait du Moyen Âge européen en chemise de bure et cotte de mailles la nouvelle passion des fidèles du petit écran. Il y avait des chrétiens en France quand elle était une communauté ancrée dans la foi, quand elle était, selon Michelet, « une conquête de l'Église ». Il en reste encore, mais ils disparaissent les uns après les autres à mesure que ce pays de cocagne s'abandonne aux plaisirs du consumérisme et du divertissement.

« France, fille aînée de l'Église, es-tu fidèle aux promesses de ton baptême ? […] France, fille de l'Église et éducatrice des peuples, es-tu fidèle, pour le bien de l'homme, à l'alliance avec la sagesse éternelle ? » On se pose bien des questions à son sujet : où l'Église était-elle tout ce temps ? Qu'a-t-elle fait, que n'a-t-elle pas fait ? Lui fera-t-on procès pour non-assistance à âmes en perdition ? A-t-elle été dépassée par l'ampleur de la faillite, est-elle censurée (par qui, pourquoi) ? A-t-elle, à son tour, perdu son âme ? Mais le berger a-t-il le droit de faillir ? Se peut-il que l'Église ait, comme dans l'histoire de La Chèvre de monsieur Seguin, cédé aux caprices de ses ouailles ? Jésus a dit : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle. »

Quel est ce grain de sable qui a brisé cette merveilleuse machine vieille de deux mille ans ? […]